Sunlight in the Appalachian forest
Rayon de soleil dans la forêt des Appalaches

J’ai découvert, en réalisant ce film, à quel point tout dépend de la lumière. Dès l’aube, la lumière émergeant des ténèbres porte en elle-même une tension, une contradiction. Nous la situons dans un conflit ou rivalité avec l’obscurité. À chacun sa lumière. Personnellement, je ne suis pas habitué à la lumière au nord du 60e degré de latitude nord, et encore moins à celle au sud du 60e degré de latitude sud. En fait, «ma lumière », celle que je connais depuis mon enfance, est celle qui brille au 45e degré de latitude nord, le long de la vallée du Saint-Laurent et au nord des Appalaches. Tourner dans le Grand Nord et le Grand Sud m’a donc demandé d’apprendre comment la lumière s’y comportait.

Church, Aurora Borealis
Frederic Edwin Church, Aurora Borealis, 1865

Un film a besoin d’images en mouvement, d’interactions entre des gens et la Nature qui, au lieu d’être décrites verbalement, se manifestent de façon éclatante. Un film a surtout besoin d’une histoire captivante qui se déroule devant nos yeux, nous révélant un monde jusque-là inconnu. Avant de tourner ce film, j’ai travaillé surtout dans le domaine des récits (livres, reportages etc.) ainsi que des documentaires radiophoniques. Le cinéma est plus exigeant que la langue écrite et la langue parlée : mais il offre un plus grand éventail de moyens à celui qui cherche à reconstituer ou à se créer un monde. Le cinéaste doit chercher la meilleure lumière, doit expérimenter, vivre, partager – et même souffrir. Lorsque ma caméra a gelé raide à -50° C (-58° F), et bien moi aussi j’ai gelé. Des moments que celui-là m’ont démontré qu’en bouquinant dans une bibliothèque, l’on ne peut pas apprendre grand chose sur l’environnement polaire – le froid intense fait donc partie intégrante de l’histoire que je vous raconte! Ce froid intense m’a forcé à respecter les gens que je filmais, car le message véhiculé par un film dépend en grande partie du confort ou de l’inconfort des gens que l’on voit à l’écran, de leur authenticité, de la possibilité qu’ils ont de livrer le meilleur d’eux-mêmes devant la caméra.

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Naviguer en région polaire, loin des documents écrits: photo prise par GT